Pour quelques cas de Covid détectés parmi les 27 millions d’habitants de Shanghai, le gouvernement a mis en place un confinement strict qui commence à faire monter la colère des habitants obligés de rester chez eux.
Ces mesures draconiennes se matérialisent par exemple par la présence de robots à quatre pattes et de drones. Dans les rues de la métropole diffusant des messages d’alerte et de recommandations sanitaires. Ils parcourent les rues en diffusant des messages demandant de prendre régulièrement la température, de se désinfecter fréquemment, de s’isoler, d’aérer les pièces, de respecter les mesures sanitaires et de porter les masques.
De plus en plus d’habitants s’épuisent nerveusement face à un confinement qui s’apparente à de la séquestration, certains menaçant de se suicider. C’est le cas par exemple d’un expatrié français qui est obligé d’être maitrisé par des volontaires et à qui il est rappelé que vivant en Chine, il doit respecter la règlementation chinoise.
La scène, filmée et postée sur Wechat, est devenue virale. Par peur du coronavirus, Shanghai s’est mise sous cloche, donnant l’image d’un univers concentrationnaire dans lequel les habitants doivent, par exemple, descendre les animaux de compagnie par la fenêtre pour les promener.
En plus des drones, les volontaires en combinaison blanche intégrale parcourent les rues en intimant l’ordre de rentrer chez soi et de se faire tester. Le début du confinement a commencé il y a plus d’un mois dès que les infections ont concerné environ un cas pour 8600 habitants, alors qu’à titre de comparaison les contaminations en France représentent un cas pour 350 habitants, vingt-cinq fois plus.
Les doutes sur le variant, bien qu’il s’agisse certainement d’Omicron, et le taux de vaccination expliquent en partie la sévérité des mesures même si Shanghai n’a enregistré que 344 décès. Des messages sont également diffusés pour mettre en garde contre tout désir de liberté et pour demander à veiller à ce que les enfants ne téléchargent pas de jeux vidéo en ligne.
Cette situation est le résultat du choix de la politique zéro Covid quoi qu’il en coûte du gouvernement alors que, dans le même temps, la plupart des autres pays prennent des mesures d’allègement des gestes barrières. Cette dictature sanitaire s’accompagne désormais de réactions de révoltes postées sur internet et aussitôt censurées, telles que le témoignage de ressources qui commencent à manquer, du manque de place en quarantaine ou d’ambulance de disponible, de même des demandes explicites pour que le gouvernement change de politique.
D’autres habitants affirment ne plus craindre la prison, considèrant qu’ils sont emprisonnés depuis le début du confinement, et interpellent directement les forces de l’ordre, immobiles dans leur véhicule, pour leur demander d’agir. Malgré un contrôle social très strict, certains habitants acceptent de filmer des vidéos et de les diffuser, comme un chauffeur poids lourds confiné depuis cinq mois dans son camion sur le parking de son entreprise avec ses collègues.
L’entrée de l’entreprise a a été murée et les salariés ont interdiction formelle de rejoindre leur logement. Le chauffeur routier qui doit dormir dans la couchette de son camion sans pouvoir voir sa femme et son fils de huit ans, révèle commencer à être déprimé par la situation qui s’éternise et n’avoir rien à faire.
Pour s’occuper, le chauffeur alimente un blog, un de ses collègue promène son chien ou un autre fait des tours de camions sur le parking. Il confirme aussi que l’accent a été mis sur la sécurité de l’entreprise plutôt que sur l’individu. Les commodités restent celles mises à disposition avant la pandémie, avec l’impossibilité de se laver tous les jours et l’obligation d’utiliser les sanitaires des bureaux pour faire sa toilette avec une simple bouilloire et une bassine.
Au début du confinement, l’entreprise a distribué à chaque salarié un sac de vivre et des ustensiles de cuisine, mais avec le temps plusieurs salariés commencent à se plaindre de la faim et à se sentir faible. Pour s’alimenter en protéines, les chauffeurs ont installé un échafaudage qui peur permet de pêcher dans la rivière aux eaux troubles coulant de l’autre côté de mur d’enceinte.
Les autorités de Shanghai ont mis en place une organisation millimétrée pour livrer des vivres aux habitants cloitrés mais principalement dans le centre-ville, la livraison dans les quartiers périphériques n’est pas aussi régulière et ils commencent à ne plus avoir de réserve ou alors des produits arrivent périmés, même du riz, l’aliment de base.
Des vidéos montrent de plus en plus des habitants manifestant pour réclamer du pain et de manière plus générale de quoi manger ou se rebellant contre la police, les employés municipaux et les volontaires en combinaison intégrale surnommés d’après un dessin animé de Pixar, les grands blancs.
Ce type de contestation n’avait jamais été revue depuis Tien An Men et la situation est parfois si désespérée que des habitants n’hésitent pas à pêcher depuis leur balcon dans des bassins d’agrément au pied des immeubles. Les 7.000 français vivant à Shanghai sont soumis au même confinement, comme Elsa qui vit en Chine depuis huit ans et demi, une conseillère d’éducation au lycée français et chanteuse à temps plein qui n’a plus de revenus depuis le 8 mars. Elle habite dans une ruelle typiquement shanghaïenne, bordée de bars mais dont l’accès à la rue principale a été fermé par des cadenas.
Dans certains cas, des portes ont même été soudées après avoir bénéficié d’une dépollution dynamique, selon la terminologie du Parti. Elsa fait des zooms avec sa famille en France et se teste quotidiennement. Elle envoie la photo du résultat du test aux autorités grâce à une application spécifique pour ensuite télécharger son nouveau QR code.
Le système, qui permet aux volontaires de récupérer les résultats en temps réel, est extrêmement intrusif, les résultats sont obtenus appartement par appartement, avec un code vert pour les habitants ayant envoyés leur résultat et un code gris pour les appartements vides ou pour les habitants n’ayant pas envoyé le résultat. Les volontaires ont alors pour mission d’aller frapper aux portes des habitants ayant un code gris pour leur demander de se mettre en règle.
Ils réceptionnent également les livraisons de nourritures et distribuent alimentation et médicaments aux habitants enfermés chez eux. Lorsqu’il y a trop de cas positifs, les habitants n’étant plus autorisés à sortir sur le palier, les volontaires se chargent aussi de sortir les poubelles.
Elsa concède une certaine excitation à recevoir un colis dont elle ne connaît pas ni la date de livraison, ni le contenu. Pierre, un autre expatrié, est patron d’un bar et de deux restaurants qu’il a dû fermer. Pour compléter les colis du gouvernement, il fait des commandes sur des sites internet privés qui peuvent encore livrer mais uniquement pour des commandes d’une certaine importance.
Les résidents d’un immeuble s’organisent alors en groupe pour commander les quantités minimales requises. L’activité économique des livraisons privées génèrent, depuis le confinement, des revenus importants et les livreurs constituent la seule profession à être débordée en ce moment. Ils déposent les commandes à l’entrée de l’immeuble car les résidents ne peuvent pas aller plus loin que le hall d’entrée, la police ayant posé des scellés en plastique devant la porte d’entrée.
Une fois les colis récupérés, les habitants assurent eux-mêmes la livraison aux différents étages. Le seul moment où les résidents sont autorisés à sortir, décrit par Pierre comme un moment de liberté, est le jour où les scellés sont enlevés et que les volontaires s’installent en bas des résidences tous les deux jours pour effectuer des test PCR collectifs en complément des autotests quotidiens.
Si le test est positif, le malade est dirigé vers un centre souvent bondé qui peut dans le meilleur des cas être un hôtel. Pour s’assurer que l’objectif d’une contamination zéro sera respecté, les cas positifs sont emmenés par autobus puis regroupés dans d’immenses hôpitaux de campagnes installés dans des entrepôts désaffectés, des gymnases ou des piscines, obligeant parfois les personnes à dormir dans des cartons et pour pallier le manque de toilettes, les volontaires distribuent des couches.
Lorsque des habitants refusent de respecter la politique sanitaire et les décisions d’urgence, les volontaires se rendent chez la personne concernée et l’informent officiellement de son arrestation, selon l’article 82 de la loi publique, et de son interrogatoire à venir.
Les arrestations se font sans ménagement, les enfants sont séparés de leur famille, l’animal de compagnie d’un cas positif peut être abattu en pleine rue, les familles sont expulsées de leur logement mais des habitants protestent car les autorités veulent aussi en profiter pour réquisitionner les habitations pour y installer des lits d’isolement.
Guillaume, un expatrié qui gère une académie d’apprentissage de l’étiquette et des bonnes manières, a été traumatisé par son isolement forcé et a fui Shanghai pour se réfugier dans l’ouest du pays non confiné. Il considère avoir été maltraité pendant sa quarantaine et explique avoir été mis dans une chambre d’hôpital au lavabo rouge de crasse et enfermé à clé sans eau, sans serviette, sans papier toilette, sans savon et autres produits d’hygiène.
Les infirmières entraient dans la chambre dès cinq heures et demi du matin pour effectuer les premiers tests. Guillaume ne connaît pas la raison de sa présence dans la chambre, ne sait pas s’il est positif ou négatif, ni combien de temps va durer son enfermement. C’est seulement au bout d’une semaine, qu’un médecin avouera à Guillaume qu’il n’a jamais été testé positif.
Petit à petit, la situation s’améliore à Shanghai comme pour l’immeuble de Hugues et sa femme qui est passé en vert car aucun cas positif n’a été détecté depuis deux semaines. Les résidents peuvent désormais sortir dans l’enceinte de la résidence même si le risque de repasser en rouge persiste dans le cas où un des 2.000 voisins serait à nouveau testé positif. Après Shanghai, Pékin pourrait désormais voir sa situation se détériorer et connaître des restrictions identiques.
https://www.tf1.fr/tf1/sept-a-
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