Une mutation génétique de notre ADN intervenue au cours des dernières centaines de milliers d’années a été identifiée par des chercheurs et expliquerait les différences dans la façon de penser entre nos ancêtres et Neandertal. Cette mutation se situe au niveau de la production des neurones dans la partie du cerveau utilisée pour former les pensées les plus complexes.
Depuis plusieurs années déjà, Neandertal n’est plus considéré comme beaucoup plus primitif que les hommes modernes, l’analyse de dizaines de squelettes il y a trois ans avait permis de formuler l’hypothèse que Neandertal pouvait par exemple soigner des malades et venir en aide aux femmes enceinte.
D’autres études récentes ont montré que les nouveau-nés de Néandertal pesaient approximativement le même poids que ceux de l’homme moderne, révélant une histoire gestationnelle relativement identique et qu’il n’était pas beaucoup plus violent que ses descendants contrairement à l’idée répandue jusqu’alors.
En 2021, une étude publiée dans la revue Nature Ecology & Evolution révélait que Neandertal avait aussi su développer la capacité de percevoir et produire des sons de la parole humaine. Même si Neandertal semblait avoir exploité tout son potentiel, la comparaison avec Homos Sapiens restait encore très limitée.
Une nouvelle étude parue dans Sciences fait état de différences marquantes dans le développement du cerveau des deux espèces. Une des caractéristiques la plus marquante du cerveau humain par rapport à ces proches cousins, tels que les chimpanzés, est sa taille quatre fois plus grande et le lobe frontal, utilisé pour certaines de nos pensées les plus complexes, produit aussi beaucoup plus de neurones dans le cerveau humain.
Mais la comparaison avec le chimpanzé atteint cependant rapidement sa limite car il faut remonter environ sept millions d’années en arrière pour retrouver un ancêtre commun. Les chercheurs se sont tournés vers des ancêtres plus récents pour effectuer des comparaisons et les paléoanthropologues ont remarqué, en étudiant les cerveaux de différentes espèces d’hominidés, que leur taille a considérablement augmenté il y a deux millions d’années pour atteindre sa taille actuelle il y a environ six cent milles ans.
L’homme de Neandertal avait à cette époque un cerveau aussi gros que le nôtre, mais plus allongé, certaines régions cérébrales ayant pu évoluer de manière différente. Les chercheurs ont décidé d’exploiter des traces d’ADN retrouvées à l’intérieur des fossiles de certains spécimens et ont réussi, à partir de ces données, à reconstruire des génomes entiers de l’homme de Néandertal et de l’homme de Denisova. son cousin d’Orient.
Les scientifiques ont alors pu rechercher les différences les plus remarquables entre notre génome et celui de ces deux ancêtres. L’ADN humain contient environ 19.000 gènes et les protéines codées par ces gènes sont majoritairement identiques entre les trois espèces, mais il a pu aussi être identifié quatre-vingt-seize mutations spécifiques à l’homme moderne.
Selon l’étude, une de ces mutations semble modifier le gène appelé TKTL1, très actif lorsque le cortex cérébral humain est en développement et présent notamment dans le lobe frontal qui joue un rôle essentiel pour les fonctions cognitives. Des expérimentations effectuées en injectant la version humaine de ce gène dans le cerveau en développement de souris et de furets ont révélé que ce gène incitait le cerveau des animaux à produire plus de neurones.
Des expériences ont ensuite été menées sur des cellules humaines provenant, après consentement de femmes ayant avortées, de fragments de tissu cérébral fœtal. Les chercheurs ont retiré le gène TKTL1 des échantillons de tissus ave des ciseaux moléculaires et ont découvert que le tissu cérébral humain produisait alors moins de cellules progénitrices, celles produisant des neurones.
En dernier lieu, les scientifiques ont reproduit des cerveaux miniatures de Neandertal, à partir d’une cellule souche humaine, en modifiant le gène TKTL1 afin que n’apparaisse pas la mutation humaine et en intégrant d’autres mutations trouvées chez nos parents. La cellule souche a été placée dans un bain de produits chimiques afin de produire un amas de tissu cérébral en développement, appelé organoïde cérébral.
Un cortex miniature composé de couches de neurones a été créé à partir de cet élément et des cellules progénitrices ont été produites. Ces expériences ont montré que ce cerveau de Neandertal reconstitué produisait moins de neurones que celui avec la version humaine du gène TKTL1 et que le simple ajout de gène aurait pu avoir une conséquence très importante sur la production de neurones de l’homme moderne.
Le gène TKTL1 n’explique cependant pas à lui seul la spécificité de notre cerveau par rapport à celui de Néandertal, d’autres chercheurs étudient des dizaines d’autres mutations qui pourraient expliquer les différences d’évolution entre Neandertal et l’homme moderne. En 2021, une équipe de l’université de Californie avait découvert qu’une de ces mutations semblait modifier le nombre de connexions que les neurones établissent entre eux et en juillet 2022, des chercheurs indiquaient que deux autres mutations modifiaient le rythme de divisions des cellules cérébrales en développement.
https://sciencepost.fr/
Comment here